Un trop petit tour et puis s’en va : Michel Barnier n’est plus premier ministre. Il lui aurait fallu plus de temps pour déployer ses ailes de fin négociateur. Et la France politique qui s’enfonce désormais dans un chaudron ardent, est bien trop malade pour supporter un bon père tranquille, sage et visionnaire. Merci à l’homme de Savoie d’avoir osé se lancer…
Parmi les nombreux orateurs et présidents de groupes qui se sont succédés au perchoir de l’Assemblée nationale hier sur les motions de censure déposées par le Rassemblement national et le pseudo Nouveau Front Populaire, c’est Stella Dupont, députée non inscrite, qui a eu, selon nous, les mots les plus justes : « Nous n’avons pas de plan B ! ».
Car, toujours pour reprendre les termes de l’élue du Maine-et-Loire, « s’il est urgent de mettre un terme à ce bazar », dans la mesure où « c’est le pays qu’il faut servir, pas les partis », le vote très large de la motion de censure du PLFSS et la démission subséquente du gouvernement de Michel Barnier ouvrent une grande période d’incertitude qui repose sur une certitude : la chienlit et l’impasse politique sont garanties jusqu’en juillet prochain a minima.
Qu’on se le dise, oyez, oyez citoyens, les Français vont devoir se débrouiller sans un gouvernail étatique stable qui serait en mesure de prendre des décisions, adaptées pourtant aux nécessités du moment ou aux besoins pressants des agriculteurs, des acteurs de l’immobilier, des Outre-mer, pour ne citer que ces Français.
Oui, la France est dans l’impasse et quand bien même ce soir à 20h Emmanuel Macron annoncerait le nom d’un successeur à Michel Barnier, l’Assemblée nationale ingouvernable ou impossible qui est sortie des urnes le 7 juillet 2024 ne manquera pas de faire tomber le successeur de l’homme de Savoie.
De deux choses l’une :
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Ou bien le président de la République nomme un homme de droite, tel Sébastien Lecornu ou Bruno Retailleau, chargé de nouer une alliance renforcée avec le Rassemblement national. Mais le risque de faire exploser le pseudo bloc central de la macronie est trop grand ; certes des mesures utiles à la France pourront être prises en matière de sécurité et d’immigration, mais sur le plan économique, nous aurons l’assurance d’avoir un budget 2025 trop socialiste, puisque tel est l’ADN du contre-budget et des lignes rouges présentées par le RN. Dommage. Car c’est dans les dépenses somptuaires d’un Etat inefficace qu’il faut trancher à la hache plutôt que d’augmenter à l’infini des impôts comme malheureusement le prévoyait le budget 2025 établi par Michel Barnier et ses équipes.
Au passage, soulignons ô combien le personnel politique français depuis plus de cinquante ans, qu’il soit de droite ou de gauche, est incapable de réduire les prélèvements obligatoires, de baisser la dépense publique, de la rendre plus efficace. Il ne sait que voter des impôts, des impôts, des impôts, et malheureusement le budget Barnier n’échappait pas à cet écueil dramatique.
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Ou bien Emmanuel Macron tente une sortie de secours vers la gauche, en nommant Bernard Cazeneuve par exemple, qui échouera aussi piteusement, pris en tenaille par LFI qui déteste les anciens mammouths du PS (François Hollande compris).
Cette percée à gauche est totalement impossible : les macronistes (pour ce qu’il en reste) qui feignent de pouvoir convaincre des socialistes ou des écologistes de former une majorité relative centrale se trompent lourdement : le PS et les écologistes d’aujourd’hui partagent avec LFI la même radicalité socialo-wokiste.
Bref il n’y a pas de plan B !
Et pire, les acteurs d’une crise de régime regroupés dans les extrêmes, aidés par l’erreur historique et coupable de la dissolution d’un Emmanuel Macron plus seul que jamais, vont désormais s’acharner sur la bête blessée qu’est aujourd’hui la Vème République.
Vous verrez : dans quelques semaines, les extrêmes se retrouver à nouveau pour conditionner leur soutien éventuel au prochain gouvernement, à un enterrement de première classe de la réforme des retraites, à quelques mesures socialisantes et à l’introduction d’une forte dose de proportionnelle pour les prochaines élections législatives.
Une façon supplémentaire d’assurer le retour du régime des partis et de la IVème République.
Il est vraiment urgent qu’Emmanuel Macron descende enfin de son Olympe et envisage un départ du pouvoir pour rendre possible une refondation complète de la République française…