On croit bien des choses improbables,
Et pourtant : le pire est souvent certain.
Ce qui nous semble intolérable,
Est parfois le fait du Malin.
Jugez plutôt : on pensait les lettres de cachet abolies,
Ordre du roi, mandats d’arrêt, tant d’infamies.
L’Ancien Régime a fait long feu, du moins le dit-on,
On s’illusionne, on se trompe, l’arbitraire a toujours cours,
Mais on veut absolument que règne la Raison ;
On souhaite entièrement qu’elle paraisse au grand jour.
La déception mêlée de colère a plus d’un tour,
Certaines décisions sont de basse Cour !
Prenez un écrivain franco-algérien, un honnête citoyen,
Penseur habile et homme de bien,
Qui, de retour dans sa patrie de naissance,
Est accusé de certaine intelligence.
Avec qui ? Avec l’ennemi ? On se demande bien quel est celui-ci.
Bon, on le place au cachot,
Le monde alors est abasourdi,
On prête à notre homme mille maux.
Boualem Sansal, tel est son nom mahométan,
Devenu personnage d’un bien mauvais roman,
Est embastillé comme un assaillant,
Sur décision d’un gouvernement.
Depuis longtemps déjà l’Algérie,
Nous reproche notre colonie.
Il est d’évidence que ce pays s’est depuis longtemps nourri,
D’une haine anti-française dont Boualem est à la merci.
Quel crime a-t-il commis ?
Il a pensé, il a écrit. Est-ce un délit ?
C’est une loi des dictatures de museler les écrivains,
Comme si l’on pouvait interdire d’avoir des idées,
Et ce n’est hélas pas l’apanage des bédouins,
De bâillonner les futurs académiciens.
Quoiqu’il en soit, Boualem est aux arrêts,
Et notre diplomatie affairée,
Un bras de fer est engagé,
Il n’est plus temps de vociférer.
Notre courage est à l’épreuve,
Peut-on plus longtemps tolérer,
Qu’on nous provoque, qu’on nous manœuvre ?
Il n’est plus l’heure de s’excuser !
Vincent Roy
Ecrivain, critique littéraire et journaliste. Longtemps collaborateur au Monde, il est critique littéraire à Artpress, à Causeur, au JDD et éditorialiste à Cnews et Europe1. Dernier ouvrage paru : Retour à Kensington, roman (Cherche-midi, 2024).