l'ITW politique
16H09 - samedi 15 février 2025

L’ITW politique de Philippe Latombe, député MoDem de Vendée : « Je parie que nul ne connaît encore le nom du prochain président de la République »

 

 

Opinion Internationale : bonjour Philippe Latombe, merci d’avoir accepté de répondre à Opinion Internationale. Vous êtes le député de la première circonscription de Vendée (Laroche-sur-Yon, Challans), membre des Démocrates, c’est-à-dire du MoDem. Vous êtes également représentant de l’Assemblée nationale à la CNIL, vice-président du groupe d’amitié France-Israël, et vous figurez parmi les députés les plus actifs sur les questions d’IA, de numérique et de développement de l’économie du futur. Est-ce que cette présentation est correcte ?

Philippe Latombe : Oui, elle est tout à fait correcte. Merci pour l’introduction.

 

Pour commencer, quel est votre bilan du Sommet pour l’action sur l’IA qui s’est tenu les 11 et 12 février ?

Il y a trois grands points à retenir. Le premier, nous avons vécu en direct un changement d’ère géopolitique. Les États-Unis vont clairement engager une guerre commerciale pour conserver leur hégémonie, notamment en matière numérique. Le deuxième point, c’est que la France et l’Europe ne peuvent pas rivaliser seules avec les États-Unis en termes de puissance d’investissement. Nous avons besoin des Émirats, des Canadiens, de l’Inde et d’autres partenaires, car les 109 milliards annoncés sont en grande partie des investissements directs étrangers. Nous devrons trouver des marges de manœuvre budgétaires pour ne pas devenir dépendants de pays extérieurs et conserver la souveraineté sur nos infrastructures. Enfin, l’IA représente une révolution industrielle et sociétale.

Nous devons absolument produire nos propres modèles qui, en plus d’assurer notre souveraineté, respecteront nos valeurs et notre vision de la société. C’est très concret. Par exemple, l’IA développée en Chine, comme celui de Baidu, fonctionne de manière très différente de l’IA occidentale. La manière de raisonner, les données utilisées sont très influencées par la culture chinoise. En revanche, un moteur comme celui de Mistral, avec des données européennes, a une approche différente, plus centrée sur notre réalité. Idem pour l’approche anglo-saxonne, américaine de ChatGPT. Cette guerre des IA est aussi une guerre culturelle.

Vous avez mentionné le moteur Mistral et Le Chat dont Emmanuel Macron a fait la publicité pendant le Sommet de Paris. Ne craignez-vous pas que Mistral soit à l’IA ce que Qwant est aux moteurs de recherche. Qwant est selon nous un excellent moteur de recherche et tant mieux si les solutions françaises prospèrent. Mais il n’a pas rencontré le succès qu’a connu Google malgré les incitations très fortes des pouvoirs publics au début des années Macron. Est-ce vraiment aux politiques de dicter aux usagers les offres auxquelles ils doivent souscrire ?

Ce que je constate, c’est que Mistral a des qualités intéressantes, notamment en termes de protection des données personnelles. Il respecte mieux les règles de confidentialité, ce qui est très important en Europe. Les performances de Mistral sont impressionnantes pour un usage quotidien et pour le respect de nos valeurs. Mistral est un bon début, mais il faut améliorer constamment le modèle, et c’est pour cela que sa promotion est importante.

De même, et c’est l’essentiel, des solutions technologiques françaises ou européennes doivent être fortement soutenues par l’Europe et par nos pays : je pense notamment au supercalculateur européen Jupiter.

 

Vous êtes également très engagé sur la lutte contre la cybercriminalité. Vous connaissez j’imagine le service d’urgence 17Cyber. Le grand public, les TPE et PME ne le connaissent guère.

Le 17Cyber est une initiative lancée dans le cadre de la loi de programmation du ministère de l’Intérieur. Il s’agit d’un numéro d’urgence, accessible 24h/24 et 7j/7, pour aider les victimes de cybercriminalité. Nous étions trois députés à soutenir ce projet depuis le début, et il a trouvé sa traduction concrète.

Oui, vous avez raison : il y a un vrai problème de notoriété ! Bien que le lancement ait eu lieu avec des reportages dans les médias et des interviews à la télévision, la campagne de publicité proprement dite n’a pas eu les moyens qu’elle mérite. Les gens ne connaissent pas suffisamment ce numéro. Le budget pour la promotion de cette initiative était insuffisant jusqu’à présent. Nous avons prévu une campagne de publicité nationale à la prochaine rentrée de septembre, car il est impératif de faire connaître ce numéro pour aider les victimes de cybercriminalité.

 Rappelons comment le trouver en allant sur le site https://17cyber.gouv.fr/.

 

Vous êtes plutôt Bayrou ou Retailleau ?

Une question sur votre circonscription, Monsieur le député. Vous devez la création d’un nouvel hôpital à Challans. La ministre de la Santé, Catherine Vautrin, en visite sur place le 14 février, vous a-t-elle donné des assurances ?

Il existe déjà un hôpital à Challans, mais il est vieillissant et ne répond plus aux besoins de la population, notamment pendant l’été où les urgences sont saturées à cause des touristes. Il y a deux solutions : soit on modernise cet hôpital en surplace, ce qui coûterait très cher, soit on le reconstruit ailleurs, en périphérie de Challans, pour un accès plus efficace. Je suis favorable à cette seconde solution. Il est crucial que nous agissions vite, car les temps d’attente en été peuvent atteindre jusqu’à 12 heures. Il est indispensable d’améliorer l’offre de soins.

 

La question « j’entre dans l’histoire ». Si une loi, ou une décision historique devait porter votre nom, quelle serait-elle ?

Une loi sur la commande publique qui privilégierait les entreprises françaises et européennes. Nous devons absolument donner la priorité à notre économie locale et à la souveraineté économique de la France et de l’Europe.

 

Et pour conclure, comme à notre habitude, « la question langue de bois » : en vue de 2027, vous êtes plutôt Bayrou du MoDem ou Retailleau le Vendéen comme vous ?

Je ne peux pas répondre à cette question aujourd’hui parce que tout simplement la campagne présidentielle de 2027 sera probablement très différente de ce qu’on imagine aujourd’hui. Je pense que beaucoup de bouleversements sont à prévoir et le nom du futur président de la République n’est peut-être même pas encore connu.

 

Propos recueillis par Michel Taube

 

Directeur de la publication