Il y avait quelque chose de pitoyable dans les propos de François Bayrou à l’Assemblée Nationale sur le dossier Bétharram.
Rejeter la faute sur un mort, le regretté Claude Allègre, sur une personne éloignée depuis longtemps de la politique, Elisabeth Guigou, ou sur une personne démonétisée, Ségolène Royal, cela frisait l’indécence.
D’autant que le scandale a commencé à éclater à ce moment-là, quand ces personnes étaient au pouvoir, c’est alors que la justice est entrée en action. Pas avant, quand Bayrou était Ministre ! Et la véritable question n’est pas sur le rôle de Claude Allègre mais sur le fait de savoir si Bayrou, avant, était au courant des dérives de cet établissement scolaire où sa femme enseignait le catéchisme, et s’il s’est abstenu d’agir.
La manière Bayrou est connue depuis longtemps, on renvoie la faute sur les autres. Cela avait d’ailleurs parfaitement fonctionné lors d’un autre scandale, celui du sang contaminé, où Laurent Fabius avait pris à bras-le-corps le problème sanitaire que ses prédécesseurs n’avaient pas traité, et c’est lui que l’opinion publique avait taillé en pièces, pas les fautifs. En jetant en pâture ceux qui ont pris leurs responsabilités, Bayrou espère peut-être rejouer ce scénario.
Mais, avec Bayrou, c’est souvent ainsi, ce n’est pas lui, c’est la faute des autres, il n’est pas responsable. D’ailleurs pour éviter ce risque, il essaie de ne décider de rien, et surtout pas de réformer.
Les différents choix budgétaires, sur la Loi de finance comme sur la Sécurité sociale, en attestent. Bien sûr, il n’est pas responsable de l’effroyable dérive des dépenses publiques, surtout depuis 2021. Quoique, ses députés Modem ont analysé et voté les choix de Bruno Le Maire et Emmanuel Macron…
Rappelons également qu’il était Haut Commissaire au Plan ! Un poste important de la République où il était présumé servir de vigie et proposer des grands caps pour notre pays, sauf s’il considérait que ce n’était qu’un bâton de maréchal ou un « fromage » de la République ! Honteux !
Si on analyse le budget Bayrou, c’est assez simple : toujours plus de dépenses publiques et toujours plus d’impôts et de taxes ! Que ce soit du côté des entreprises, des salariés, des retraités, Bayrou leur demande de se « serrer la ceinture » mais ne réduit jamais véritablement les dépenses de fonctionnement de l’État.
Prenons l’exemple du travail. Bayrou avait un chantier intéressant dans la remise à plat du fonctionnement de France Travail, un organisme dirigé par un ami d’enfance de Macron, dont la rémunération, les dépenses de fonctionnement, somptuaires pour certains, et surtout l’efficacité sont régulièrement remises en cause, sévèrement, par tous les rapports, entre autres par la Cour des Comptes, une efficacité sous la barre des 15% selon beaucoup, quand les entités privées font nettement mieux pour bien moins cher ! Comment ne pas drastiquement réformer une entité inefficace à plus de 85% ? Inexplicable…
À tel point que la question de la privatisation de France Travail pourrait se poser, devrait se poser… Comme pour beaucoup de missions que l’État fait moins bien et pour beaucoup plus cher que le privé !
Mais pas pour Bayrou, lui préfère demander aux retraités de « se serrer la ceinture à partir de 2000€ de pension mensuelle », une expression qui aurait fait les choux gras des « Guignols de l’info », il préfère augmenter le coût du travail, peser sur l’apprentissage, mais surtout sans réformer France Travail. Et sans réformer tout le reste !
Il nous faudrait pourtant poursuivre la baisse du coût du travail, continuer à faciliter l’entrée des jeunes dans la vie active, comme permettre aux seniors de rester, le plus longtemps possible, actifs. Pas l’inverse ! Il nous faut au contraire augmenter notre taux d’emploi, et pas le taux de chômage ! En parallèle, arrêtons de toujours faire payer notre modèle social à la France qui travaille ! Bien sûr, bien moins de CSG et un peu plus de TVA…
Surtout, il nous faut penser un nouveau Pacte Social, quitte à repartir de la page blanche. La révolution industrielle et sociétale que nous vivons, dans un nouveau monde non pas 2.0 mais 6.0 avec l’IA et toutes les technologies actuelles nous impose de changer de logiciel. Ne gardons pas un mode de pensée, un mode de gouvernance, un mode de rapports sociaux complètement obsolètes.
Réécrivons notre Pacte Social. Quelle France souhaitons-nous pour les cinquante prochaines années ? Quel modèle social ? Et en fonction de ces grands choix, décidons de son mode de financement, décidons de la place de l’État dans ce nouveau monde.
Sans ce grand débat, la France sera en état d’obsolescence programmée… et nous aurons deux guerres de retard sur nos partenaires et concurrents…
Michel Barnier avait eu une excellente idée : créer un ministère de la Coordination Gouvernementale, avec à sa tête un excellent grand serviteur de l’État, la sénatrice Marie-Claire Carrère-Gée. Coordonner les actions des différents ministères, les mettre en cohérence, participe du bon sens.
L’étape suivante aurait pu être de lui confier la lourde tâche de s’attaquer à l’efficacité gouvernementale. Car il nous faut vite un MEGA, un Ministère de l’Efficacité Gouvernementale et Administrative. Il nous faut non pas augmenter les impôts mais adapter nos administrations, toutes nos administrations, à nos besoins, optimiser, fermer si nécessaire, réduire ou augmenter leurs missions, voire privatiser, mais surtout ne pas « entasser », empiler.
Bayrou n’a gardé ni Carrère-Gée ni son ministère, et les ministres qu’il a repris, mis à part les vrais politiques comme Retailleau, Darmanin ou Delattre, semblent n’être là que pour asséner des éléments de langage, qui ne sont souvent que des mots mièvres, pas pour réformer !