Edito
11H10 - mardi 25 février 2025

À quand une grande CDU française ? L’édito de Michel Taube

 

Source: bundeswahlleiterin.de Données cartographiques: © Die Bundeswahlleiterin 2020

En France, comme dans toute l’Europe, nous devons regarder de très près les résultats des élections législatives en Allemagne. Nous faisions partie de ceux qui craignaient (d’où notre édito « Deutschland unter alles ? ») que l’AfD, la droite ultranationaliste allemande, n’atteigne les 25 à 30 % des suffrages lors des élections du dimanche 23 février 2025. Comme souvent avec les éditorialistes qui ne sont pas de bons prévisionnistes météo, nous avons eu tort !

L’AfD a donc fait un score moindre que ne le prévoyaient les derniers sondages. Au vu des résultats quasi définitifs, la CDU va pouvoir gouverner l’Allemagne en coalition avec le SPD, pouvant se passer des Verts allemands. Le prochain chancelier allemand s’appelle donc Friedrich Merz.

Les Allemands ont massivement voté (82,5 % des électeurs se sont rendus aux urnes, un record depuis la réunification en 1990). Malgré la vague d’attentats islamistes récents, les milliers de suppressions d’emplois dans le secteur automobile, l’ingérence foudroyante d’Elon Musk et des réseaux sociaux dans la campagne électorale, les 20% de votes en faveur de l’AfD sont un score plutôt rassurant. Bien entendu que le parti hérité du nazisme a fait un score historique et est désormais un parti de masse.

Singularité allemande : les Länder situés à l’est du pays et les électeurs âgés de 25 à 34 ans ont massivement voté pour l’AfD. Il est d’ailleurs frappant d’observer la nouvelle carte électorale de l’Allemagne, profondément divisée par une nouvelle ligne de démarcation entre l’ancienne Allemagne de l’Est, entièrement conquise par l’AfD, et l’Allemagne de l’Ouest, qui a voté CDU et SPD.

 

Le choix de l’Europe

Mais le peuple allemand a donc décidé – une dernière fois ? – de faire confiance aux conservateurs de la CDU. Le prochain chancelier allemand, Friedrich Merz, a devant lui une responsabilité historique : consolider l’espoir que fait naître son élection, sous peine de risquer l’arrivée au pouvoir de l’AfD d’ici 5 à 10 ans, ce qui est désormais de l’ordre du possible.

Il faut ici saluer et mesurer la résilience et la résistance des peuples européens à la tentation de voter pour les partis nationalistes ou ultranationalistes. Prenez par exemple le conflit entre la Russie et l’Ukraine : malgré les tentations de certaines élites de soumission à la Russie de Poutine, tous les sondages européens montrent que les Européens restent favorables au soutien à l’Ukraine. Dans un dernier sondage du Figaro paru hier, avec 238 000 votants, 66,5% des lecteurs répondent oui à la question : « l’Europe a-t-elle raison de continuer à soutenir Zelensky ? ».

Le même syndrome pro-Européen s’est produit en Allemagne.

La question qui se pose aux Français est simple : toutes choses égales par ailleurs, qui pour incarner une CDU française ? Un magma entre la macronie et LR ? Un parti LR revigoré par une nouvelle présidence flamboyante d’un Bruno Retailleau ou d’un Laurent Wauquiez ? Un consortium des droites allant d’une Marine Le Pen recentrée au versant droitier de la macronie ?

Manifestement, que ce soit en Italie, où Madame Meloni est une conservatrice libérale pro-Européenne et non une fasciste, ou en Allemagne aujourd’hui, les conservateurs retrouvent leur leadership, menaçant les ultra-nationalistes qui se rêvaient au pouvoir demain.

Quant à la gauche, c’est la seule véritable surprise de ce scrutin allemand : le parti Die Linke (“La Gauche » en français) a obtenu un score de 8,8 %. Affaiblie par une récente scission, la version allemande de LFI a finalement réussi à s’imposer auprès des jeunes, au point de devenir le parti le plus populaire chez les 18-25 ans.

Décidément, dans tous les pays d’Europe, si la victoire des ultranationalistes ne cesse de menacer le destin des peuples, une forte résilience et une forte résistance du vote conservateur pro-européen, dont la CDU est la championne, constituent – comme ce fut le cas avec Nicolas Sarkozy en 2007 en France – la meilleure assurance tous risques contre les aventures nationalistes.

 

Michel Taube

 

 

Directeur de la publication

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