La chronique de Patrick Pilcer
10H29 - jeudi 27 février 2025

Conclave des retraites, Capi, pas Capi, Capichi ? La chronique de Patrick Pilcer

 

C’est parti, le fameux « conclave des retraites » démarre, avec une carte blanche.

Carte pas si blanche, en fait, car chaque ministre a déjà commencé à orienter la discussion, à l’encadrer de plus en plus strictement, à dessiner précisément la feuille de route, ou à la borner.

Force est même de se demander si ces déclarations successives, en amont du lancement du conclave, ne sont pas destinées à produire un épais brouillard d’où le gouvernement pourra sortir ce qu’il souhaite voir sortir… Capichi ? C’est compris ? Si vous avez compris, c’est que le Gouvernement s’est mal exprimé…

 

Prenons le « souhait » indiqué par le Gouvernement Bayrou d’inclure dans ces discussions la retraite par capitalisation.

Évoquer la capitalisation avant l’ouverture des discussions, c’est laisser entendre qu’une part des pensions de retraite à venir devra provenir de l’épargne que se seront constituée les Français. Mais la question est alors : est-ce en plus de la retraite classique, par répartition, ou à la place d’une partie de ces pensions ?

Si la part faite à la capitalisation est à la place d’une partie de la retraite par répartition, il s’agit là au mieux d’une manœuvre de plus pour faire prendre des vessies pour des lanternes, au pire d’une pensée digne d’Arsène Lupin ! Car sans le dire cela reviendrait à diminuer les pensions provenant du régime par répartition en demandant aux futurs retraités d’épargner pour compenser cette baisse…

Si la part venant par la capitalisation est en plus des retraites par répartition, il ne faut pas prendre les Français et les enfants du « bon Dieu » pour des canards sauvages ! Car cela existe déjà et cela porte trois noms : PER, Assurance vie et investissement locatif !

Les Français savent depuis très longtemps que les différents gouvernements et les « partenaires sociaux » auront de grandes difficultés à assurer des pensions dignes au moment de leur retraite. Ils connaissent aussi bien l’état de la démographie de notre pays que la compétence, disons limitée, de l’État, au sens large, à gérer correctement les deniers confiés. D’où le très grand succès depuis quelques années des PER, les Plans Épargne Retraite, qui permettent à chaque contribuable de bénéficier d’une réduction d’impôt pour les sommes qu’il mettrait au sein de ces PER.

Ces Plans d’Épargne Retraite complètent d’ailleurs une autre forme de retraite par capitalisation que les Français adorent depuis des années : l’Assurance vie. Les PER ajoutent une dimension réduction d’impôt mais le principe est le même, on investit régulièrement une somme pour le long terme, et à un moment on opte pour la rente ou une sortie en capital.

De même, la plupart des investissements immobiliers locatifs sont réalisés avec ce même objectif : préparer le long terme, la retraite. Quand on achète un bien locatif, on vise exactement cela. On s’endette, pendant 10 ou 20 ans, on rembourse l’emprunt et ensuite on dispose soit d’une rente, les loyers, soit d’un capital si l’on décide de vendre ce bien immobilier. Et ce système marche parfaitement, enfin marchait.

Et c’est là où la pensée du Gouvernement Bayrou accouche au mieux d’une souris, ou d’une méconnaissance économique, au pire d’une tromperie sur la marchandise.

Plutôt que d’évoquer la retraite par capitalisation, en créant un brouillard épais qui permettrait de diminuer les pensions venant de la répartition par l’épargne à venir des Français, le Gouvernement Bayrou aurait dû d’abord tout faire pour relancer le marché de la construction et l’immobilier.

Depuis des années, en fait depuis Macron ministre de l’Économie puis Macron Président, tout est fait pour décourager l’investissement immobilier. Pire tout est fait pour rogner les revenus venant de l’immobilier. On taxe, on surtaxe, on empêche, on décourage.

Il était temps pour Bayrou de prendre le contrepied de la politique contreproductive menée depuis dix ans. Mais dans le brouillard que Bayrou a lui-même créé, il s’est trompé de cible ! La politique de retour au plein-emploi, un des rares succès de Macron, fonctionnait bien. Patatras, le Gouvernement Bayrou décide de rompre avec la trajectoire difficilement obtenue, il augmente le coût du travail et celui de l’apprentissage. Malgré les éléments de langage, très classiques, sur le taux d’emploi, sur l’emploi des jeunes et des seniors, le ministère du travail redevient le ministère du chômage.

Et bien sûr, par contre, rien sur le logement !

Pourtant un petit calcul rapide pourrait aider à remettre la mairie au milieu du village. Regardons les chiffres ne serait-ce que de la construction de logements neufs. Manque sur 2024 environ 125 000 constructions. Des constructions qui pourtant rapportent à l’État de la TVA. Si nous prenons une moyenne de 200 000€HT pour les logements manquants à l’appel, cela fait 5 milliards d’euros de TVA qui auraient dû alimenter les caisses de l’État et qui ont fait pschitt ! 5 milliards par an en moins…

Chacun sait aussi que la construction d’un logement, c’est de l’emploi, c’est de la consommation (électroménagers, meubles, déménagements, etc…) et je ne parle là que du neuf, il faudrait ajouter aussi l’ancien. On peut donc facilement tripler ce montant pour estimer le manque à gagner au sens large pour l’État : 15 milliards d’euros !

Plutôt que de demander, « naïvement », aux retraités qui gagnent plus de 2 000€ de se serrer la ceinture, plutôt que de tenter de rogner les pensions de retraite venant des régimes par répartition en leur substituant les revenus de l’épargne à venir des Français, plutôt que de lancer un « conclave » d’où ne peut sortir qu’une souris, et désespérer encore plus le Peuple de France, le Gouvernement Bayrou aurait dû relancer le plus vite possible le secteur immobilier. Et là, son silence est assourdissant !

Ce n’est pas une erreur, le brouillard se dissipe : c’est une faute politique majeure ! Vivement un changement de gouvernance !

 

Patrick Pilcer
Président de Pilcer & Associés, conseil et expert sur les marchés financiers

Président de Pilcer & Associés, conseil et expert sur les marchés financiers
Patrick Pilcer, Président de Pilcer & Associés, conseil et expert sur les marchés financiers