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09H05 - jeudi 27 février 2025

Philippe Schreck (RN) : “Au Rassemblement National, l’eau et la biodiversité comptent autant que la sécurité et le pouvoir d’achat. Car c’est aussi la préoccupation des Français !”

 

Opinion Internationale : Bonjour Philippe Schreck, merci d’avoir accepté de répondre à Opinion Internationale. Vous êtes député du Var, membre du Rassemblement national, et vous siégez à la commission des lois de l’Assemblée nationale. Vous êtes aussi avocat (comme Marine Le Pen d’ailleurs) et vous, vous continuez à exercer parallèlement à votre activité de député.

Philippe Schreck : pour moi, il est important de continuer à exercer. Avocat est un métier que j’aime, et il me permet d’apporter une vision juridique et structurée aux débats et aux décisions que nous prenons dans l’arène politique.

 

Comment réagissez-vous à l’arrestation de Mohamed Amra et d’une vingtaine de ses complices ? On rappelle que son évasion avait causé la mort de 2 surveillants de prison en mai 2024 lors de son transfert de la prison d’Évreux vers le tribunal de Caen ?

Je veux remercier et rendre hommage à nos policiers, à la grande qualité de leur enquête. Je pense aux victimes et à leurs familles en espérant que la justice leur apportera un peu de réconfort.

 

Le Rassemblement national est souvent hostile à l’Europe mais reconnaissez-vous que le mandat d’arrêt européen a très bien fonctionné et permis ce fantastique coup de filet ?

Nous sommes hostiles à l’Europe lorsqu’elle nous coûte très cher, en détruisant notre industrie et notre agriculture par des normes, et en étant l’incarnation d’une bureaucratie qui méprise les peuples. Lorsque certaines choses fonctionnent et c’est la moindre des choses, nous nous en félicitons.

 

En ce qui concerne la situation des surveillants de prison, pensez-vous que la situation a changé depuis l’assassinat de ces deux surveillants de prison l’année dernière ?

Non, je ne pense pas que la situation ait changé. J’ai déposé des dizaines d’amendements pour améliorer la sécurité des surveillants et leurs conditions de travail en prison, notamment en proposant l’utilisation de camions blindés adaptés lors des transferts de détenus dangereux. Mais tous ces amendements, je dis bien tous, ont été rejetés, sans explication valable. La réalité, c’est qu’on est toujours dans la même situation de mépris pour nos agents pénitentiaires.

 

J’aimerais mettre cette actualité tragique en regard de la révélation de ces cours de danse et de ces messages proposés aux prisonniers de la maison d’arrêt de Seysses pour la Saint-Valentin. Gérard Darmanin veut interdire les activités ludiques dans les prisons. Vous approuvez ?

Monsieur Darmanin, ou plutôt ceux qui ont été au pouvoir pendant ces dix dernières années, semblent découvrir seulement maintenant qu’il se passe des choses inadmissibles dans nos prisons. Entre les cours de karting, l’aqua-poney, et autres activités loufoques, on voit bien que ce n’est pas de cette manière que l’on doit traiter les peines de prison. Il faut que ces dérives cessent.

 

Êtes-vous favorable, dans la magistrature, dont les obligations de neutralité sont inhérentes à leur métier, à l’interdiction de certains syndicats comme celui de la magistrature ?

Il est clair que la spécificité du métier de magistrat doit être respectée. La représentation syndicale, comme dans d’autres professions, n’est pas un problème en soi, mais ce qui dérange, c’est que certains syndicats prennent un tournant purement politique, particulièrement lorsqu’ils militent pour des idéologies de gauche ou d’extrême-gauche. C’est incompatible avec leur métier et leur statut de fonctionnaires. Je pense qu’il faudra un jour se pencher sérieusement sur cette question. Leur rôle ne doit pas être celui d’un acteur politique, mais celui d’un garant de la justice et de la défense des intérêts spécifiques de leur corporation.

 

Marine Le Pen vous a chargé de travailler sur les enjeux de biodiversité et d’eau au sein du Rassemblement national. Pourquoi avoir accepté cette mission sur un sujet où l’on n’attend pas forcément le RN ?

Nous nous intéressons à tous ce qui préoccupe les Français. Depuis longtemps, nous ne sommes plus mono-sujet. Nous devons nous positionner sur les questions d’eau et d’environnement et surtout ne pas abandonner ces sujets aux écologistes qui ne sont que des militants reconstructeurs, d’ultra-gauche et wokistes. C’est la raison pour laquelle j’ai pris la présidence du groupe d’études eau et biodiversité à l’Assemblée nationale.

 

Depuis un an, il pleut beaucoup en France et aucun dispositif de collecte des eaux de pluie n’existe dans notre pays, contrairement à bon nombre de nos voisins. Nous sommes également en plein Salon de l’agriculture : l’eau constitue pour nos paysans un sujet très sensible (on se rappelle la guerre des méga-bassines à Sainte-Soline). Quelles sont vos principales propositions en matière d’eau ?

Tout d’abord, je veux dire que, comme je l’avais déjà souligné dans vos colonnes l’an passé, le gouvernement fait les mauvais choix. En 2024, il a adopté un « Plan Eau » qui a considérablement alourdi les redevances payées par les usagers aux agences de l’eau, et ce de plus de 500 millions d’euros par an.

L’eau est un sujet important, notamment dans les circonscriptions rurales de l’arc méditerranéen qui sont globalement en manque d’eau. Ces questions touchent à la salubrité, à l’agriculture, au tourisme, à l’énergie, à la fiscalité et à l’aménagement du territoire. La transversalité du sujet le rend indispensable.

Sur le fond, nous devons travailler sur la gouvernance, les nouvelles technologies et les moyens de modération de la consommation sans que cela tende à la régression économique. Je pense proposer un projet global très rapidement.

 

La France va accueillir en juin prochain à Nice le Sommet mondial des océans. Qu’en attendez-vous ?

Je crains que ce sommet soit une Cop 21 que s’offrent à grand coût Messieurs Macron et Estrosi afin de pallier l’inexistence politique de fait du président de la République.

 

La montée en puissance de Bruno Retailleau et son duo avec Gérald Darmanin commencent-ils à faire de l’ombre au Rassemblement national selon vous ?

Pas du tout. Bruno Retailleau et LR ne représentent que 4 % de l’électorat. Les Français savent bien que Bruno Retailleau n’a pas les moyens ni les coudées franches malgré la fermeté qu’il affiche. Pour nous, sa percée est purement médiatique et ne correspond pas à la réalité du terrain.

 

Le RN votera-t-il bientôt la censure du gouvernement Bayrou ?

Les Français connaissent nos lignes rouges : sur la sécurité, l’immigration et le pouvoir d’achat. Si ces problèmes ne sont pas traités avec sérieux et avec des solutions concrètes, nous ne pourrons pas laisser faire longtemps. Si le gouvernement continue à naviguer à vue, il est évident qu’il devra rendre des comptes et que, tôt ou tard, il sera censuré.

 

Passons à la question « j’entre dans l’histoire » : si vous deviez laisser une trace durable dans l’histoire de la politique française, quelle loi ou décision aimeriez-vous voir porter votre nom ?

Une grande réforme de la procédure pénale, notamment en ce qui concerne l’exécution des peines. Il est impératif de remettre de la fermeté, de la rigueur et de la cohérence dans notre système pénitentiaire.

 

Et pour conclure, comme à notre habitude, « la question langue de bois » : si demain, Marine Le Pen et Jordan Bardella arrivent au pouvoir, quel ministère aimeriez-vous qu’ils vous proposent ?

Je suis à leur disposition et reste modeste dans mes ambitions. Ce que je sais, c’est que je continuerai à travailler pour servir la France, où que l’on me place. Si je peux apporter ma contribution à l’élaboration de politiques fortes et cohérentes pour la sécurité, la justice et le bien-être des Français, je serai toujours présent.

 

Propos recueillis par Michel Taube

Directeur de la publication